C’est la nuit dans l’Arctique. Une jeune fille est sortie de son igloo pour prendre l’air. Soudain une fracture de la banquise la sépare de sa famille. Voilà Uqsuralik seule pour survivre. Elle erre dans le froid, chasse pour se nourrir, affronte les éléments et dialogue avec les esprits. Elle est rejointe par des chiens sauvages puis intègre un groupe d’humains croisé sur sa route. Elle est acceptée dans cette nouvelle famille avec laquelle il faut apprendre à vivre, dans les épreuves et dans la joie. Par le biais de son personnage, Bérangère Cournut nous initie à la culture inuit depuis l’intérieur et c’est passionnant ! Ce roman d’apprentissage invite à abandonner les façons de penser occidentales. Les Inuits, peuple ancien, ont leur façon propre d’être au monde en lien avec les esprits surnaturels : profonde connaissance du monde animal, de la nature, maîtrise de l’art de la chasse, interprétation des signes. Aucun jugement, le point de vue est celui de la narratrice, l’héroïne courageuse dont on suit le destin. Uqsuralik grandit, donne la vie, est confrontée au deuil, à la violence, à la séparation. Elle doit se réadapter sans cesse à des groupes nouveaux. L’auteure, qui s’est très bien documentée, saisit par la littérature l’âme de ce peuple avec une écriture à la fois précise et poétique. (F.E. et M.-T.D.)
Pendant l’hiver 1946, dans la Prusse orientale envahie puis annexée par les Russes avides de vengeance, les femmes tentent de survivre. Dépouillées, affamées, frigorifiées, violées, battues, parfois à mort, elles ne pensent qu’à protéger leurs enfants. Eva et Marta sont deux mères dévouées. Deux de leurs jeunes enfants, un garçon et une fille, vont séparément franchir le Niémen vers la Lituanie en quête de nourriture et faire ainsi échapper leur famille à une issue mortelle quasiment programmée. C’est le premier roman d’un scénariste lituanien. Il voulait depuis longtemps évoquer le destin extraordinaire de ces enfants-loups, comme on les a appelés et depuis pratiquement ignorés. En courts chapitres, les différents personnages, simplement croqués ou décrits de manière plus fouillée, sont tous bien réels. La noirceur du récit est difficilement soutenable et le courage des mères et des enfants étonne. Les survivants sont peu nombreux et aujourd’hui veulent oublier. L’auteur met en évidence la bonté de nombreux Lituaniens, et même de quelques Russes. Il évoque également la résistance à l’occupant soviétique de ce pays balte. Une lecture facile, instructive et très digne d’intérêt devrait procurer à cet ouvrage, lambeau dramatique d’histoire, un succès mérité. (E.G. et M.W.)
Camille a quitté Strasbourg pour Toulouse. Elle y a retrouvé un certain équilibre affectif auprès de Denis, divorcé, lui aussi. Avocate spécialisée dans les affaires familiales, elle s’est montrée redoutablement efficace lors de sa dernière plaidoirie. Mais, le mari de sa cliente se suicide sous ses yeux. Dévastée, elle s’enfuit, s’accrochant à l’espoir de retrouver en Bretagne la sérénité des jours heureux de son passé auprès de grands-parents aimants, aujourd’hui disparus. Elle devient juriste dans une biscuiterie. Dans Le choix des apparences, nouvel ouvrage de la prolifique Martine Delomme (D’une vie à l’autre, NB mars 2019) on passe de l’univers de la justice avec ses jeux de rôle, ses rapports de force, ses codes, à celui, plus humain, de la petite entreprise, analysée avec beaucoup de justesse. Petit à petit, au contact des gens simples, l’héroïne fend l’armure. Les souvenirs enfouis ressurgissent : les rapports conflictuels avec un père machiste, une mère inexistante, un mariage raté. La tendresse, l’empathie remplacent l’obligation d’excellence. Dans un décor breton plein de charme, on lit agréablement ce récit de facture classique et au dénouement attendu. Un joli portrait de femme résiliente. (A.-C.C.-M. et A.-M.D.)
Au coeur des Marquises, l'archipel le plus isolé du monde, où planent
les âmes de Brel et de Gauguin, cinq lectrices participent à un atelier
d'écriture animé par un célèbre auteur de best-sellers. Le rêve de leur
vie serait-il, pour chacune d'elles, à portée de main ? Au plus profond
de la forêt tropicale, d'étranges statues veillent, l'ombre d'un
tatoueur rôde. Et plein soleil dans les eaux bleues du Pacifique, une
disparition transforme le séjour en jeu...
meurtrier ? Enfer ou
paradis ? Hiva Oa devient le théâtre de tous les soupçons, de toutes les
manipulations, où chacun peut mentir... et mourir. Yann, flic
déboussolé, et Maïma, ado futée, trouveront-ils lequel des hôtes de la
pension Au soleil redouté... est venu pour tuer ? Un huis clos à ciel
ouvert, orchestré de main de maître.
Enzo raconte sa vie, ou plutôt celle de sa famille. C’est un chien qui adore d’abord son maître, Denny, pilote de course, puis sa femme Eve et leur fille Zoé. Il partage leurs émotions et fait part des siennes, encourage Denny dans des moments familiaux et judiciaires très difficiles, le poussant au-delà de ses limites, tout en jouant, courant et faisant des blagues. Fan de courses automobiles qu’il regarde à la télévision et qu'il aime pour le danger, la vitesse et l’habileté des conducteurs, il mord la vie à pleines dents, espérant être réincarné en homme dans une seconde vie.
Professeur agrégé d’histoire, Christian Carayon est, depuis 2012, l’auteur de thrillers remarqués (Torrents, HdN octobre 2018). Ce nouveau roman plonge dans une sombre histoire où se mêlent sciences occultes, rancunes, secrets de famille, et amours contrariées. L’omniprésence d’une femme mystérieuse, soupçonnée de pouvoirs maléfiques, ajoute encore à une ambiance déjà lourde. L’intrigue, bien construite et un peu tirée par les cheveux, tient en haleine jusqu’au bout, portée au paroxysme par l’atmosphère oppressante, sauvage et envoûtante de l’île de Bréhat en hiver, superbement décrite : dérèglement de la nature et des éléments, mer et vents en furie, landes désertes, rochers aux formes inquiétantes, sources de mystérieuses légendes. (J.M. et M.-N.P.)
En plein bush australien, Wilbrook est une ex-bourgade minière isolée où peu de choses se passent. Par une matinée caniculaire, Chandler, responsable du poste de police local, voit arriver un homme couvert de sang, terrifié, prénommé Gabriel, il vient d’échapper aux griffes d’un tueur, un certain Heath. Sauf que quelques heures plus tard, Heath se présente à son tour, contusionné, ensanglanté, terrorisé, pour déclarer une agression en tout point similaire – dont Gabriel serait l’auteur…
Partant d’une situation plutôt cocasse, si elle n’était aussi complexe et glaçante, James Delargy, un Irlandais voyageur dont c’est le premier polar, manie les règles du genre avec habileté. Il sait construire plusieurs scénarios possibles, ne négligeant ni indices ni impasses. Il y insère une histoire antérieure sans dérouter le lecteur ni affaiblir le suspense. Il a la sagesse de ne privilégier qu’un seul point de vue, celui de son modeste sergent, dont la connaissance du pays et de ses habitants se révèle indispensable face aux prétentions d’un supérieur hiérarchique qui ne cherche qu’à l’humilier. Malgré un fléchissement vers la fin, le livre reste dominé par la beauté aride de la brousse que surplombent des îlots de forêt dense, lieux de tous les mystères. (A.Lec. et L.D.)
Août 2014. Arrivé depuis peu à Nuuk, capitale du Groenland, le
journaliste danois Matthew Cave observe, avec des scientifiques, un
cadavre momifié découvert dans la glace. Un ancien Viking ? Mais le
lendemain le corps a disparu et le policier qui le gardait gît, éventré,
dans une mare de sang. Ce meurtre rappelle celui, jamais élucidé, de
quatre hommes éventrés, vidés et écorchés, en 1973. Matthew décide
d’enquêter.
Tout se sait à Nuuk, où, en été, un soleil éclatant alterne avec des
brouillards épais. Pourtant ces meurtres, perpétrés avec un « uto »
(poignard courbe qu'utilisent les femmes pour la chasse au phoque) sur
des hommes soupçonnés d’inceste, n’ont jamais été élucidés. Personne ne
veut entendre parler des abus sexuels, tellement ordinaires sur l’île,
surtout les notables qui y vivent. Les menaces s'accumulent sur le
journaliste et l'étrange jeune femme qui lui prête main forte lorsque
leur complicité est soupçonnée. Premier roman de Mads Peder Nordbo
traduit en français, La fille sans peau est un thriller noir,
sauvage même, dans lequel la tension monte jusqu’à la fin, assez
compliquée cependant, tout en éclairant la culture et l’histoire du
Groenland, gigantesque île danoise partiellement autonome depuis 1979.
Un auteur nordique à suivre ! (C.P. et M.Bo.)
À trente ans, Nina s’occupe à Paris du statut juridique de réfugiés qui
tous, attendent un droit d’asile. Venus d’horizons fort divers –
Afrique, Afghanistan, Ukraine et autres horizons –, ils déposent, dans
son bureau, leurs problèmes, leurs angoisses, leurs espérances. Or Nina
se débat entre de douloureuses inquiétudes familiales et une pénible
rupture sentimentale. Et les échos de ses déchirures répondent aux
interrogations de personnes en souffrance.
Voici, éclatant de vie, une série de portraits d’hommes et de femmes en
détresse qui trouvent en Nina écoute attentive de leur misérable
existence et conseils appropriés. Vaste fresque d’une accablante
actualité. En courts chapitres, parfois dédiés à certains demandeurs qui
la retiennent davantage, mais toujours écrits à la première personne,
la romancière adopte une écriture forte : phrases très scandées et
imagées, soulignant avec vigueur et parfois drôlerie, des situations
tragiques. Et l’héroïne de ce premier roman a-t-elle droit au bonheur ?
Existe-t-il ? Où le trouvera-t-elle ? À Colombo ? Auprès d’un vieil ami ?
Sa recherche lointaine de réalisation personnelle induit une
introspection sans complaisance, et entre en résonance avec les émotions
suscitées par ces humains aux richesses enfouies mais finement révélées
et partagées. (A.C. et L.D.)
Agigaël messagère des anges - Marie-Bernadette Dupuy
Série Abigaël ; Tome 6
A l'aube de l'été 1948, la guerre continue de hanter les esprits. Chacun
pleure ses disparus et tente de guérir ses blessures. Pourtant, sur la
vallée des Eaux-Claires souffle un vent de renouveau : Abigaël vit
désormais auprès de son grand amour Adrien et s'apprête à donner le jour
à leur premier enfant. Mais l'accouchement, long et pénible, se révèle
une terrible épreuve. La messagère des anges ne doit sa survie qu'à
l'intervention inespérée d'une exilée de retour dans son pays natal,
Claire Roy, la dame du Moulin du Loup.
Toute à la joie de ces
retrouvailles inattendues et de cette naissance presque miraculeuse, la
jeune femme doit bientôt lutter contre des esprits haineux, surgis de
l'au-delà. Malgré le soutien de sa famille, son bonheur d'épouse et de
mère est menacé. Les dons d'Abigaël seront-ils assez forts pour l'aider à
triompher...
